Balance Risques Benefices

A chacun son schéma thérapeutique adapté

Ces dernières années, le traitement du diabète de type 2 s’est nettement distancié d’un schéma thérapeutique quasi fixe, identique pour toutes les personnes diabétiques.

Les médicaments et les insulines actuellement disponibles permettent d’envisager, pour chaque patient, des objectifs thérapeutiques adaptés individuellement et, notamment, de peser soigneusement les avantages et les inconvénients de chaque option thérapeutique. Les effets indésirables ainsi que le risque d’hypoglycémie, l’effet attendu sur le poids et d’éventuelles préférences de l’individu concerné par le diabète doivent être pris en compte dans le choix du traitement. L’expérience que les médecins possèdent concernant un médicament et ses coûts sont également des facteurs décisifs.

Nous présentons deux exemples à titre introductif:

Exemple 1
Walter Stump est un fonctionnaire fiscal âgé de 41 ans, chez lequel un diabète sucré de type 2 a été récemment diagnostiqué. Le médecin de famille fait état d’un taux de HbA1c de 9,8 %. L’activité « sportive » de Monsieur Stump se limite au court trajet entre sa voiture et son bureau et, de temps en temps, à une promenade ou à une balade. Il est par ailleurs en bonne santé, même s’il prend régulièrement des comprimés contre l’hypertension artérielle. Il est fumeur. D’une taille corporelle de 175 cm, il pèse 108 kg, ce qui correspond à un indice de masse corporelle (IMC) de 34 kg/m2. Son traitement antidiabétique consiste désormais en deux comprimés par jour de metformine. Actuellement, ses valeurs de glycémie sont comprises entre 12 et 15 mmol/l.

« Les médicaments et les insulines actuels permettent de peser soigneusement les avantages et les inconvénients de chaque option thérapeutique »

Exemple 2
Hilda Utiger, âgée de 85 ans, est atteinte du diabète de type 2 depuis de nombreuses années. Depuis un accident vasculaire cérébral qui a provoqué une paralysie latérale droite et des difficultés d’élocution, elle habite un EMS et passe ses journées dans une chaise roulante. Elle souffre d’insuffisance rénale chronique et d’une affection cardiaque et a dû subir, il y a huit ans, une intervention chirurgicale sur les vaisseaux coronaires. Ces derniers mois, elle a connu plusieurs chutes. Son appétit est modéré. Ces derniers mois, elle a perdu 5 kg. Son taux de HbA1c est de 8,7 %. Aucune glycémie n’est constatée. Son diabète est traité deux fois par jour par l’administration d’une insuline mixte.

Réflexions
S’agissant de ces deux personnes très différentes, et ce non seulement au niveau de l’anamnèse, le choix du traitement du diabète devrait reposer sur les questions suivantes :
– Quels sont les objectifs du traitement du diabète ?
– Quelles valeurs de glycémie et quels taux de HbA1c doivent être atteints ?
– Quels traitements sont possibles ? De quels autres facteurs faut-il tenir compte ? – À quels effets secondaires faut-il s’attendre?
– À combien s’élèvent les coûts ?

« La définition des objectifs doit aussi prendre en considération l’état de santé général de la personne concernée, de son âge ainsi qu’éventuellement de handicaps physiques ou mentaux »

Quels sont les objectifs du traitement du diabète ?
Le tableau 1 mentionne tous les points dont il faut tenir compte lors de la détermination des objectifs du traitement.
Le principal objectif du traitement antidiabétique est dans tous les cas d’obtenir une bonne situation métabolique au niveau des glucides, avec un risque aussi faible que possible de taux de sucre trop bas (« hypoglycémie »).

 

Tableau 1

Objectifs En Thermes

 

Voir loin
À long terme, il convient par ailleurs d’obtenir un réglage glycémique qui permet d’éviter au mieux les conséquences du diabète telles que les maladies oculaires, l’insuffisance rénale, les troubles de la circulation cardiaque et de la circulation dans les jambes. Des problèmes comme l’hypertension artérielle, les troubles du métabolisme lipidique et le poids corporel doivent également être pris en compte dans ce contexte, comme nous le verrons en abordant l’exemple 1.

La définition des objectifs doit aussi prendre en considération l’état de santé général de la personne concernée, de son âge ainsi qu’éventuellement de handicaps physiques ou mentaux. Certaines personnes sont tributaires de l’aide de proches ou du personnel soignant pour le traitement de leur diabète. Il faut alors également tenir compte de leurs disponibilités. Nous y reviendrons en abordant l’exemple 2.

Quelles valeurs de glycémie et quels taux de HbA1c doivent être atteints ?
En principe, il convient d’atteindre un taux de HbA1c inférieur à 7,0 %, ce qui correspond approximativement à une glycémie moyenne calculée sur les 10 à 12 dernières semaines d’à peine 8 mmol/l.

Dans certains cas, par exemple lors de diabète récent, d’hypoglycémies apparaissant rarement ou alors uniquement avec une faible intensité, d’un bon état de santé général et de l’absence de complications tardives du diabète, il faudrait viser, lorsque les capacités mentales et physiques permettent d’atteindre un bon réglage glycémique, un taux de HbA1c compris entre 6,0 et 6,5 %.

Cette recommandation est fondée sur les résultats de plusieurs essais réalisés ces dernières années avec plusieurs milliers de personnes diabétiques. En effet, ces études ont montré qu’un traitement visant un réglage strict au début du diabète, avec une normalisation rapide des valeurs de glycémie, permet d’éviter et de retarder l’apparition de complications tardives pendant encore plusieurs années. Nous aborderons cette question de plus près en nous basant sur l’exemple 1.

En cas d’état dégradé
À l’inverse, plusieurs essais ont montré qu’il est raisonnable de viser une valeur cible de HbA1c plus élevée lors d’un état de santé nettement détérioré, de maladies cardiovasculaires sévères, d’un risque élevé d’hypoglycémie et d’une faible espérance de vie. En fait, des valeurs supérieures à 8,0 % devraient être évitées dans ces cas aussi, car elles s’accompagnent généralement d’un état métabolique moins bon, susceptible d’entraîner une dégradation de la masse musculaire et adipeuse. Nous illustrerons cette situation avec l’exemple 2.

La figure 1 montre comment mettre ces réflexions en application.

 

Tabelle 1

Objectif HbA1c

 

Quels traitements sont possibles ? À quels effets secondaires faut-il s’attendre ? À combien s’élèvent les coûts ?
Il est incontestable et évident que les modifications du mode de vie restent des mesures thérapeutiques non médicamenteuses essentielles. Une alimentation équilibrée, riche en fibres et pauvre en sucreries et boissons sucrées est recommandée. Chez toutes les personnes en surpoids, une réduction du poids d’au moins 7 % est souhaitable. Elle devrait être associée à au moins 150 minutes par semaine d’une activité sportive modérée (p. ex. « aquafit », entraînement d’endurance comme le Nordic Walking et entraînement de force). Ces mesures sont également incontournables et efficaces our éviter le diabète.

Il existe par ailleurs une série de médicaments et d’insulines envisageables pour un traitement antidiabétique lorsque des modifications du mode de vie ne permettent pas d’atteindre les valeurs de glycémie visées (voir tableau 2). Le premier médicament utilisé habituellement est la metformine. Ce médicament est connu déjà depuis des décennies. Son prix est avantageux et il ne provoque pas de prise de poids indésirable. On sait par ailleurs qu’il a un effet favorable sur la prévention des conséquences tardives du diabète. Lors de l’emploi de la metformine, il convient surtout de surveiller la fonction rénale lors d’insuffisance rénale sévère. Cette dernière peut parfois constituer une raison de renoncer à ce médicament. Par ailleurs, beaucoup de personnes ne tolèrent pas bien la metformine, principalement parce qu’elle peut provoquer des douleurs abdominales, de la diarrhée et des ballonnements, Toutefois, ces effets indésirables varient fortement en fonction de la dose journalière prise.

« Chez toutes les personnes en surpoids, une réduction du poids d’au moins 7 % est souhaitable »

Parmi les autres substances, les médicaments les plus récents tels que les inhibiteurs du SGLT2, les agonistes du GLP1 et les inhibiteurs de la DPP4 occupent une place de plus en plus importante dans l’arsenal thérapeutique. Elles sont certes bien plus chères que les substances plus anciennes, mais sont plus sûres en termes d’hypoglycémie. En outre, elles n’entraînent pas de prise de poids, mais au contraire provoque parfois même une légère diminution pondérale. De plus, elles sont généralement assez bien tolérées. Un grand nombre d’entre elles sont connues pour diminuer nettement le risque de conséquences tardives du diabète.
D’anciens substances comme les sulfonylurées (et les substances appelées « glinides », que nous n’avons pas la place d’aborder ici) sont moins onéreuses. Cependant, elles peuvent provoquer des hypoglycémies, car elles stimulent la sécrétion pancréatique d’insuline indépendamment de l’apport d’hydrates de carbone et de la glycémie du moment. Des effets favorables sur les conséquences tardives du diabète n’ont pas été démontrés pour toutes ces préparations.

Il est évidemment possible de combiner ces divers médicaments entre eux ainsi qu’avec l’insuline lorsque cela est nécessaire et judicieux.

 

Tableau 2

Propirietes Des Classes

 

Quel traitement pour M. Stump ?
Ci-après, ces réflexions seront illustrées sur la base des deux exemples mentionnés :
Monsieur Stump ne souffre de diabète que depuis récemment. À l’exception de son hypertension artérielle, il est en bonne santé, mais il présente un excès de poids et est totalement allergique au sport. Dans son cas, le traitement ne doit pas se limiter à viser la baisse de la glycémie, il doit aussi prévenir les conséquences tardives du diabète et les affections cardiovasculaires en général, susceptibles d’apparaître au cours des prochaines années et décennies à cause de son surpoids et de son hypertension artérielle. C’est pourquoi les modifications du style de vie mentionnées plus haut doivent absolument lui être recommandées. Il convient de viser un taux de HbA1c inférieur à 6,5 %. Au début, il est probablement nécessaire d’obtenir une diminution rapide de la glycémie, jusqu’à la fourchette fixée, grâce à de l’insuline. Par la suite, ce patient pourrait bénéficier d’un agoniste du GLP ou d’un inhibiteur du SGLT2, qui sont particulièrement adaptés à sa situation grâce à leur effet sur le poids corporel et le risque d’hypoglycémie.

« Le principal objectif chez une personne âgée n’est pas d’éviter les conséquences tardives »

Il convient en outre de contrôler le taux de cholestérol et, le cas échéant, de recourir à un traitement médicamenteux pour le réduire. La pression artérielle doit faire l’objet d’une surveillance étroite. Selon les résultats obtenus, un ajustement de ce traitement pourrait s’imposer. Étant donné que Monsieur Stump est fumeur, un sevrage tabagique pourrait lui être suggéré. Ces trois points, qui ne sont pas directement associés au diabète, sont tout aussi importants dans la prévention des maladies cardiovasculaires.

Quel traitement pour Mme Utiger ?
Chez Madame Utiger, un taux de HbA1c supérieur à 7,0 % est
certainement acceptable. Toutefois, avec un taux de HbA1c de 8,7 %, elle présente actuellement une glycémie moyenne d’environ 11,5 mmol/l. Le principal objectif pour cette femme âgée n’est pas d’éviter les conséquences tardives. Il s’agit plutôt de fixer un traitement raisonnable et sans risque pour la patiente, qui prend en considération la fonction rénale limitée, le risque d’hypoglycémie ainsi que l’aide et le soutien nécessaire par le personnel soignant de l’EMS. Le maintien d’un traitement à une insuline mixte est probablement une solution appropriée et viable.

Un contrôle rigoureux de la glycémie chez Madame Utiger est incontournable afin qu’il soit possible d’obtenir une légère diminution prudente, sans risque, du taux de HbA1c, et de prévenir ainsi une poursuite de la dégradation de la masse musculaire, susceptible de favoriser les chutes.

Article paru dans le d-journal alémanique du mois de mai 2018
Traduction : Ursula Sila-Gasser

Auteur: Dr med. A. Spillmann