La Prof. Dre Maria Luisa Balmer concentre ses recherches sur le microbiote et le métabolisme à l’Université de Berne, en collabora- tion avec le Diabetes Center Berne (DCB). Elle fournit un aperçu passionnant de l’état actuel de la recherche sur le microbiote, en lien avec le diabète, et explique comment les personnes souffrant de diabète peuvent améliorer leur microbiote.
Le lien entre diabète et microbiote existe-t-il uniquement pour le diabète de type 2 ou également pour celui de type 1 ?
De nombreuses études montrent aujourd’hui que le microbiote, à savoir l’ensemble des bactéries intesti- nales, subit des altérations aussi bien en cas de diabète de type 2 que de type 1. Dans le type 2, ce sont surtout les espèces bactériennes qui sont touchées et qui in- fluencent le métabolisme du sucre et le poids corporel. Le lien entre microbiote et diabète de type 1 concerne plutôt le système immunitaire. Les chercheur·euses ont observé que les enfants avec un risque accru de diabète de type 1 présentent déjà un microbiote altéré avant l’apparition de la maladie, soit à cause d’une réduction de la diversité bactérienne, soit parce que le potentiel inflammatoire est plus élevé. Le microbiote aurait donc un rôle à jouer dans les deux types de diabète, même si les mécanismes sont différents.
Pourra-t-on un jour utiliser le microbiote comme mécanisme d’alerte pour éviter ou retarder l’apparition du diabète ?
Oui, c’est une approche prometteuse. De premières études indiquent que certaines altérations du micro- biote pourraient signaler un risque de diabète. C’est en quelque sorte un signe avant-coureur qui précède l’apparition de facteurs de risque classiques tels que l’obésité ou des taux de glycémie élevés. L’objectif est d’établir des profils de risque en fonction du microbiote et de lancer des mesures préventives et ciblées, no- tamment par le biais de l’alimentation, des probio- tiques ou d’autres actions influençant le microbiote. Ces approches ne sont pas encore très avancées.
Où en est la recherche sur les liens entre le diabète et le microbiote ? Quelles sont les priorités ?
La recherche se focalise actuellement sur trois grandes questions :
- Quelle est l’influence exacte du microbiote sur le métabolisme du sucre et le système immunitaire ?
- Quelles sont les bactéries dont les métabolites ont un rôle décisif ?
- Comment pouvons-nous agir sur le microbiote pour en tirer partie ?
Certaines méthodes modernes comme la métagéno- mique, la métabolomique ou le recours à des souris aseptisées sont de plus en plus utilisées pour mieux comprendre les rapports de causes à effets. Les ap- proches personnalisées gagnent également du terrain ; elles portent sur l’influence de modèles bactériens individuels sur l’alimentation ou les médicaments.
De nouveaux traitements vont-ils émerger ? Quand seront-ils disponibles ?
L’objectif à long terme est un « traitement » ciblé du microbiote, visant à prévenir le diabète ou à mieux le traiter. Les stratégies peuvent consister en des probio- tiques adaptés de manière individualisée, des « cocktails de bactéries » ou même des recommandations alimen- taires spécifiques basées sur le profil micro-biologique personnel. Les premières études cliniques sont déjà en cours et portent sur certaines fibres alimentaires ou sur des mélanges probiotiques. Mais il faudra encore quelques années avant l’arrivée de tels traitements dans la pratique quotidienne. La recherche progresse.
Que conseillez-vous aux personnes atteintes de diabète qui souhaitent améliorer leur microbiote ?
Le plus important est d’adopter une alimentation variée, riche en végétaux et en fibres qui « alimentent » les bonnes bactéries intestinales. Privilégier les céréales complètes, les légumineuses, les légumes, les noix et les aliments fermentés comme le yogourt ou la choucroute (voir l’article principal). Les produits ali- mentaires hautement transformés, l’excès de sucre ou l’administration fréquente d’antibiotiques sans néces- sité médicale sont déconseillés. Une alimentation équilibrée qui renforce le micro- biote permet de compléter judicieusement le traitement du diabète. Les patient·es peuvent aussi y contribuer activement.
L’activité physique joue-t-elle également un rôle dans l’amélioration du microbiote ?
Oui, l’activité physique peut influer positivement sur le microbiote, même si cette influence est moins marquée que pour l’alimentation. Selon plusieurs études, une activité physique régulière augmenterait la diversité des bactéries intestinales et réduirait les bactéries pro-inflammatoires. Le sport semble avoir un effet positif sur le microbiote, en particulier en association avec une alimentation riche en fibres. Soulignons tou- tefois que les effets varient d’une personne à l’autre en fonction de l’âge, du type d’exercice et de l’état de santé. L’exercice physique est un facteur utile de manière globale, pour le métabolisme tout comme pour le microbiote.