Avec les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2 fait partie des maladies chroniques les plus fréquentes. Un facteur de risque auquel la médecine de genre s’intéresse de plus en plus : la ménopause. Car lorsque la production d’hormones sexuelles se tarit, les femmes avec un DT1 ou un DT2 peuvent avoir des difficultés à gérer leur diabète. Dans cet entretien, l’experte Dre Judith Bildau explique comment le métabolisme se modifie dès 40 ans, et présente des mesures de prévention efficaces.
Dre Bildau, la ménopause influe-t-elle sur le traitement du diabète ?
Selon certaines études, les femmes diabétiques ménopausées seraient moins susceptibles d’atteindre les valeurs cibles pour l’HbA1c, le cholestérol LDL ou la tension artérielle. En consultation, les patientes avec un DT1 ou un DT2 déclarent aussi avoir plus de mal à gérer leur diabète au début de la ménopause. La sensibilité des cellules à l’insuline, qui varie en fonction des hormones, est responsable des fluctuations de la glycémie. Il est donc crucial de mesurer le taux de sucre en continu pour éviter les décompensations et les complications éventuelles.
Quelle est l’influence de la ménopause, ou de la période postménopause, sur les maladies consécutives du diabète ?
Les oestrogènes ont un effet bénéfique sur les vaisseaux : ils maintiennent leur souplesse, favorisent le bon cholestérol (HDL) et réduisent le mauvais (LDL). La disparition des oestrogènes intensifie la résistance des cellules à l’insuline et augmente donc le taux de glycémie, ainsi que le taux de cholestérol LDL. C’est pourquoi les femmes ménopausées sont plus à risque de développer une maladie coronarienne associée au diabète que les hommes diabétiques du même âge. Du reste, elles présentent un risque de fracture lié à l’ostéoporose nettement plus élevé que les femmes non diabétiques.
La transition ménopausique peut durer de trois à dix ans : comment les femmes peuventelles minimiser le risque de développer un diabète durant cette période ?
En conservant un mode de vie sain. Dès 40 ans, il est essentiel d’avoir une alimentation riche en substances vitales et stabilisant la glycémie, de pratiquer une activité physique régulière et de lutter contre le stress. Combiner sport d’endurance et musculation est un bon moyen de renforcer sa musculature, d’activer la dépense énergétique et de stabiliser l’appareil locomoteur tout en réduisant le risque de fracture en cas d’ostéoporose. Il est aussi judicieux de surveiller son apport en micronutriments (p. ex. vitamine D, calcium, acides gras oméga-3), et de recourir à une supplémentation, si besoin. Les femmes qui ont eu un diabète gestationnel ou avec une prédisposition génétique au DT2 devraient faire contrôler régulièrement leur glycémie à long terme (HbA1c).
Que peuvent faire les femmes diabétiques pour traverser cette période de bouleversement dans de bonnes conditions ?
En plus de suivre les recommandations relatives à un mode de vie sain, les femmes avec un DT1 ou un DT2 doivent faire preuve de discipline et surveiller étroitement leur taux de sucre à ce stade de leur vie, afin d’optimiser le contrôle de la glycémie et de prévenir les complications aiguës et les maladies associées à moyen et à long terme.
Cela contribue aussi à dissiper les incertitudes liées à la gestion du diabète, car certains symptômes de la ménopause, notamment les accès de transpiration, sont similaires à ceux de l’hypoglycémie. La mesure continue de la glycémie via un smartphone peut permettre de détecter les variations à temps et d’agir rapidement. Le capteur transmet les valeurs glycémiques et la tendance au smartphone 24h/24, pendant 14 jours et, grâce à des alarmes en option, les utilisatrices sont averties en cas d’hyperglycémie ou d’hypoglycémie, ce qui les rassure.
Le traitement hormonal substitutif (THS) de la ménopause peut-il réduire les risques liés au diabète ?
La compensation de la carence hormonale par l’administration d’hormones bio-identiques a pour but d’atténuer les troubles de la ménopause et de prévenir les conséquences à long terme de la carence en oestrogènes. Les hormones bio-identiques peuvent avoir un effet bénéfique sur la sécrétion d’insuline, l’absorption de glucose, la sensibilité à l’insuline, les vaisseaux et le cholestérol HDL, mais aussi réduire le risque de développer un DT2. Des études montrent qu’un THS permet aux femmes diabétiques d’améliorer leur taux de glucose à jeun et leur taux d’HbA1c.
Pourquoi la gestion du stress est-elle cruciale pour bien traverser la ménopause lorsqu’on est diabétique ?
À la ménopause, la production de progestérone diminue elle aussi, ce qui peut causer des troubles du sommeil, des sautes d’humeur, des douleurs musculaires et articulaires et une augmentation du taux de cortisol. Ces troubles pèsent sur le corps et le psychisme. Il faut savoir que les hormones du stress favorisent la résistance des cellules à l’insuline et un taux de sucre élevé. De nombreuses femmes ont une double charge de travail, car elles s’occupent de leur famille et exercent une profession. Je conseille vivement à ces femmes de trouver un bon équilibre de vie et de lutter contre le stress. L’activité physique est du reste un bon moyen d’y parvenir.
La mesure continue de la glycémie (CGM) peut-elle faciliter la gestion du diabète chez les femmes ménopausées ?
Oui, car les systèmes CGM simplifient la mesure du glucose et offrent aux utilisatrices une sécurité grâce à la transmission quasi en temps réel des taux de glucose et des tendances. Elles peuvent réagir rapidement aux variations glycémiques dues aux hormones et prendre des mesures correctives. Mais je trouve tout aussi important que la mesure continue de la glycémie agisse comme une sorte de biofeedback. Les utilisatrices peuvent apprendre quels facteurs de leur style de vie font augmenter ou baisser leur glycémie. En plus d’utiliser les technologies modernes de lutte contre le diabète, je conseillerais aux femmes ménopausées de suivre une formation ciblée sur le diabète et la nutrition, afin de comprendre les effets de la ménopause sur leur métabolisme et d’apprendre des stratégies de prévention.