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Le défi : comment s’approprier les nouvelles technologies ?
Lors de l’Assemblée générale de diabètefribourg (110 personnes présentes), le Dr Giacomo Gastaldi a présenté une conférence intitulée « Intérêts des nouvelles technologies pour la gestion du diabète ». Elles sont souvent une aide précieuse pour les patients diabétiques, mais leur utilisation, qui nécessite une formation approfondie, peut aussi être une source d’anxiété.
Le quotidien d’une personne diabétique n’est pas un long fleuve tranquille. Médecin référent au service d’endocrinologie, diabétologie, hypertension et nutrition des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), le Dr Giacomo Gastaldi en est d’autant plus convaincu qu’il côtoie tous les jours des malades.
Ce qu’il a appris de ses consultations et de la littérature scientifique qu’il suit comme le lait sur le feu, c’est que « la maladie chronique provoque souvent chez le patient une forme de burn-out tant le diabète nécessite une palette de soins journaliers aussi complexes qu’exigeants. Dans ce contexte, une question fondamentale doit être posée : le malade peut-il assumer la charge supplémentaire que va représenter, en tout cas dans un premier temps, l’adoption d’un nouvel appareil de mesures du glucose en continu ou d’un lecteur Flash ? »

Un suivi permanent
Les nouveaux capteurs mis régulièrement sur le marché depuis une dizaine d’années ont changé la donne. A la différence des prises de sang capillaires pratiquées plusieurs fois par jour et qui donnait le taux de glycémie à un moment donné, les nouvelles technologies permettent un suivi permanent de la glycémie grâce à des mesures pratiquées plusieurs centaines de fois chaque jour et la possibilité donnée de suivre, en tous temps, sa courbe glycémique.

« La maladie chronique provoque souvent chez le patient une forme de burn-out »

« Le progrès est indéniable », insiste le Dr Gastaldi, tout en ajoutant que la complexité du diabète – où pas moins de 26 variables doivent être prises en considération – peut mettre en échec les algorithmes les plus sophistiqués. Dès lors, la question lancinante que se posent tous les diabétiques insulino-dépendants – trop de sucre ou trop d’insuline ? – n’est pas totalement résolue. D’où la grande prudence du Dr Gastaldi : « les nouveaux appareils aident, certes, les patients, mais ce n’est pas toujours le cas, car les informations qu’ils transmettent (courbe et flèches) distillent autant de clair que de flou ! »

« Une vraie révolution »
Mais il ne faut se méprendre. Le Dr Gastaldi est un adepte des nouvelles technologies, ne serait-ce que parce qu’elles sont porteuses d’ «une vraie révolution » : « avant, le malade devait tout anticiper ; aujourd’hui on lui propose une approche prédictive parce que les appareils de lecture lui indiquent désormais une ligne de base, qu’il va falloir apprendre à gérer ! », explique-t-il.

« Les informations transmises par les appareils distillent autant de clair que de flou ! »

L’apprentissage est donc au cœur de la stratégie proposée par le Dr Gastaldi. Parce que les appareils apportent un vrai bénéfice à leur détenteur : réduction sensible du nombre d’hypoglycémies (- 30 %), notamment pour ceux qui n’ont plus cette sensibilité, réduction du temps passé en hypoglycémie, amélioration de l’hémoglobine glyquée (2,2 % gagné) et meilleur équilibre du diabète. Aussi, parce que la technologie est en mesure de réduire le stress chez les patients, même si ce n’est pas toujours le cas. Ce sera alors au diabétologue d’évaluer la pertinence ou non du choix à faire.

Les flèches : un casse-tête
D’autre part, et bien que les appareils peuvent être mis en toutes les mains, il est indispensable de bien assimiler comment ils fonctionnent, notamment en raison des différences de systèmes qui les caractérisent (jusqu’à six mois d’enseignement intensif pour le pancréas artificiel). Le Dr Gastaldi a ainsi mis en exergue l’interprétation des flèches de tendance (↑→↓) qui figurent sur le lecteur. « C’est un vrai casse-tête, s’est-il alarmé, car, si chaque système propose des flèches, elles n’ont pas, selon l’appareil adopté, la même signification !! » Conclusion : « on doit très bien connaître son appareil ».

Complexités
Dans sa pratique hospitalière, le Dr Gastaldi a été confronté à moult problématiques relatives aux nouvelles technologies. Pour n’en relever que quelques-unes, abordées lors de la conférence, citons pêle-mêle les quelques éléments suivants :
– Il y a un délai physiologique de 10-15 minutes entre une glycémie veineuse et une glycémie interstitiel, la seconde étant plus lente ;
–  Sur le lecteur, le patient doit être surtout attentif à la moyenne et pas aux pics ;
–  Les systèmes existants sont très précis entre 4 mmol/l. et 12 mmol/l., mais beaucoup moins avant ou après ;
–  Pour se rassurer, il est toujours utile de faire une glycémie capillaire, notamment avant de se coucher ;
–  Les assurances ne remboursent que si le patient effectue au moins trois injections d’insuline rapide par jour ;
–  Quelque 5 % des patients développent une allergie à la colle utilisée. Il n’y a pas de désensibilisation possible, car personne ne connaît la recette de ces colles (trois producteurs dans le monde). Le capteur Eversense peut être porté dans un brassard  ;

« Pour se rassurer, il est toujours utile de faire une glycémie capillaire, notamment avant de se coucher »

–  Il existe un risque de sur-contrôle, ce qui peut accroître le stress du patient, mais également vider les batteries de votre appareil ;
–  Certains appareils sont équipés d’un système très utile d’alarme en cas d’hypoglycémie (ce qui n’est pas le cas du Freestyle Libre) ;
–  Certains appareils (Dexcom, Medtronic) ne sont plus aussi fiables lorsque le patient prend du Paracetamol ; ce serait également le cas avec le Freestyle Libre en
cas de prise de vitamine C ;
–  Le froid peut altérer le fonctionnement des batteries ; etc.
En un mot comme en cent : la technologie doit être au service du patient, et non l’inverse. « Il y a ainsi de nombreuses solutions à portée qu’il convient d’adapter au patient en lien avec son médecin », a conclu le Dr Gastaldi.

Auteur: Pierre Meyer