Mody

Les repérer pour éviter les erreurs de traitement

Le diabète, on le sait, est une maladie complexe. Dans les types 1 et 2, des dizaines de sites génétiques sont impliqués ; ce qui n’est pas le cas dans les six formes connues de diabète MODY où un seul gène, chaque fois différent, est concerné.

Mais que signifie ce terme de MODY ? Il s’agit de l’acronyme anglo-saxon de Maturity Onset Diabetes of the Young. Historiquement, ce diabète était défini comme un diabète débutant chez un jeune (moins de 25 ans) qui ne présente pas d’obésité, avec une histoire familiale de maladie diabétique importante et un diabète non cétosique.

« Un diagnostic précoce permet d’éviter une confusion avec le diabète de type 1 »

Cependant, cette définition a été affinée et on parle maintenant de diabète monogénique, ce qui signifie un diabète causé par la dysfonction d’un seul gène (contrairement au diabète de type 1 ou 2 qui se caractérisent par la dysfonction de plusieurs dizaines de sites génétiques).

1 à 5% de tous les diabètes
Il semblerait que ce type de diabète soit insuffisamment diagnostiqué. Il pourrait pourtant constituer entre 1 et 5 % de tous les diabètes mis en évidence dans les pays dits industrialisés.

On peut se poser la question de l’importance de détecter un diabète monogénique. En fait, comme nous le verrons plus tard, caractériser un diabète monogénique peut avoir un impact important sur la surveillance et le traitement de ces différentes affections.

En effet, le diagnostic posé de façon précoce, chez l’enfant ou le jeune adolescent, permet de ne pas confondre ce diabète avec un diabète de type 1, avec les conséquences qui s’ensuivent pour le jeune patient et sa famille.

Six types de diabète monogéniques
Je vais vous décrire brièvement les MODY connus à ce jour. Cette nomenclature peut paraître un peu rébarbative, raison pour laquelle je ne vais pas m’appesantir sur les définitions génétiques complexes, mais m’efforcer de vous donner les traits principaux de ces différentes affections.
On décrit actuellement six différents types de diabète monogéniques :

1) Le MODY 1 est dû à une modification d’un facteur de transcription, nommé HNF-4 alpha, le nom complet de cette abréviation n’a pas d’intérêt ici. Sachez que les conséquences sur la cellule bêta vont aboutir à un déficit de la sécrétion d’insuline. Cette forme de diabète est très rare, mais elle nécessite une surveillance vigilante, car elle peut s’accompagner de complications microangiopathiques. Paradoxalement, en raison d’une macrosomie fréquente à la naissance (gros bébés), cette affection peut s’accompagner d’hypoglycémies néonatales fréquentes. Ce type de diabète peut se traiter avec des sulfonylurées, avant de passer à l’insuline, si nécessaire.

2) Le MODY 2, décrit par un Français, le Professeur Philippe Froguel, est un des diabètes monogéniques les plus fréquents et se rencontre dans pratiquement tous les groupes ethniques. Il est dû à une déficience d’une enzyme, la glucokinase. Celle-ci permet la transformation, dans la cellule bêta, du glucose en énergie, ce qui va permettre à la cellule bêta de sécréter de l’insuline. En cas de déficience du gène de la glucokinase, le manque d’énergie va inciter la cellule à fabriquer et sécréter moins d’insuline.

« Le MODY 2 est un des diabètes monogéniques les plus fréquents »

Sur le plan clinique, ce diabète, s’il est recherché, peut se trouver chez de très jeunes enfants, avec une forte histoire familiale. Il se distingue par des hyperglycémies relativement modérées qui ne se détériorent pas avec l’âge. De plus, les complications tardives de ce diabète sont exceptionnelles.

« Un bon diabète »
Par conséquent, cette affection n’est traitée que par des mesures hygiéno-diététiques, sauf cas particulier (femmes enceintes). Il s’agit du bon diabète, si je puis m’exprimer ainsi. Lors de la découverte d’une glycémie anormale chez un enfant, on peut se poser la question d’un diabète de type 1, mais s’il y a une histoire familiale importante et que le dosage des anticorps adéquats est négatif, on peut écarter le spectre d’un diabète de type 1. Plus tard, chez les patients plus âgés, peut se poser la question d’un diabète de type 2. On notera, cependant, qu’un diabète de type 2 aura une histoire familiale moins importante, à savoir, moins de parents de la même lignée atteints et que l’obésité est pratiquement absente dans le MODY 2.

Un diagnostic correct de MODY 2 est donc particulièrement indiqué car il permet de rassurer le patient et sa famille et de ne pas imposer une surveillance étroite et inutile.

3) Le MODY 3, plus fréquent que le MODY 1, est dû à un défaut d’un facteur de transcription nommé HNF-1 alpha. Ceci va aboutir à un défaut de sécrétion d’insuline. Ce type de diabète devra être suivi de façon adéquate, car les complications microangiopathiques sont fréquentes. L’intérêt d’un diagnostic correct, surtout chez l’enfant, est renforcé par le fait que ce diabète peut se traiter pendant longtemps avec des sulfonylurées, évitant donc chez l’enfant un inutile traitement d’insuline. Par la suite, toutefois, un traitement d’insuline peut être nécessaire. Notons également, un risque accru de maladies cardiovasculaires, supérieur à celui rencontré dans le diabète de type 2, ce qui justifie une surveillance adéquate.

4) Le MODY 4 est dû à une déficience d’un facteur de transcription nommé IPF. Cette forme de MODY est très rare et se caractérise par un diabète plutôt modéré et facile à traiter.

5) Le MODY 5 est dû à une mutation du gène codant pour un facteur de transcription nommé
bêta. Cette mutation est heureusement également rare, car elle s’accompagne de nombreuses malformations, à savoir des kystes rénaux, des malformations génitales chez la femme et des problèmes métaboliques, comme la goutte, ainsi que des perturbations des fonctions hépatiques.

6) Pour mémoire, je citerai encore le MODY 6 dû à une dysfonction d’un gène nommé NeuroD1 ou Bêta 2.
Pour conclure, je dirai donc que ce type de diabète est encore méconnu, mais que le reconnaître permettra de prescrire un traitement adéquat qui permettra à nombre d’enfants d’éviter un inutile traitement d’insuline, ainsi qu’une intempestive surveillance chez des patients atteints d’un MODY 2. De plus, la recherche a là de précieux outils pour mieux cerner l’infinie complexité de la maladie diabétique.

Auteur: Dr Nicolas von der WEID