En Ukraine, la vie n’a jamais été facile pour les familles ayant un enfant  diabétique. Depuis le début de la guerre, le 24 février 2022, les diffi cultés  liées au diabète de type 1 se sont multipliées. Un mois après le début de  la guerre, l’association « De l’insuline pour l’Ukraine » a été créée afi n  d’acheminer la précieuse insuline tout comme d’autres produits d’aide  aux diabétiques depuis la Suisse vers l’est de l’Ukraine.

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Le diabète de type 1 est une maladie contrôlable si la personne concernée dispose de tout ce qui est nécessaire : insuline, appareil de mesure avec bandelettes réactives ou capteurs, stylos ou pompes à insuline et une alimentation adaptée. A condition eff ectivement qu’elle dispose de tout cela. Mais que faire si ce n’est pas le cas ? Comment les parents ukrainiens peuvent-ils bien s’occuper de leur enfant atteint de diabète de type 1 ? Que font les adultes diabétiques dans une zone de guerre sans matériel pour le diabète, sans insuline, sans bandelettes réactives ? Lorsque les sirènes retentissent, que les missiles pleuvent, dans les décombres, dans les abris ou sur les routes pour échapper au conflit ?

La nouvelle selon laquelle il existait une pénurie d’insuline, qui nous est parvenue peu après le début de la guerre, nous a incités à créer, le 24 mars 2022, l’association d’utilité publique « De l’insuline pour l’Ukraine », basée en Suisse.

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Difficultés de transport

Notre plan initial était de collecter des fonds le plus rapidement possible, de nous procurer de l’insuline et de l’acheminer directement à Kharkiv, dans l’est de l’Ukraine. Un ami ukrainien vivant en Suisse voulait se charger du transport. Mais deux jours avant son départ les liaisons téléphoniques et Internet avec nos contacts à Kharkiv ont été interrompues. La destination de notre livraison prévue, un cabinet médical, avait été touchée par des missiles russes.

Nous avons contacté le réseau « Medicine Warriors », initié par des étudiants de diff érents pays pour rendre l’insuline accessible aux personnes diabétiques. Grâce à ce réseau, nous avons pu entrer en contact avec la diabétologue Olena Shpak à Odessa ainsi qu’avec la fondation polonaise « Fundacja dla Dzieci z Cukrzyca » (« Fondation pour les enfants diabétiques »).

 

Poursuivre les livraisons aussi longtemps que nécessaire

Le 31 mai 2022, le premier colis de médicaments contre le diabète quitte la Suisse et arrive trois semaines plus tard dans la ville ukrainienne de Zaporijjia via Varsovie. Ainsi, 500 stylos à insuline et 20 lecteurs de glycémie avec 2000 bandelettes réactives peuvent être distribués aux enfants et adolescents concernés. Une semaine plus tard, la première livraison arrive également chez la Dre Olena Shpak à Odessa, grâce à la fiabilité de la poste allemande.

La situation de pénurie d’insuline en Ukraine s’est entre-temps stabilisée, car le Comité international de la Croix-Rouge et l’industrie pharmaceutique assurent l’approvisionnement en insuline. Cela simplifie nos propres transports, car les bandelettes réactives, les capteurs, les seringues, les aiguilles et autres ne nécessitent pas de réfrigération. Ces matériels vitaux pour les diabétiques sont aujourd’hui encore des denrées rares et excessivement chères. Les livraisons de matériel d’aide par notre association doivent se poursuivre jusqu’à ce que la situation en Ukraine s’améliore.

 

Recherche de familles d’accueil

Les attaques dévastatrices contre les infrastructures civiles aggravent chaque jour la situation de la population dans l’est et le sud de l’Ukraine. Sans chauffage ni électricité, l’hiver risque de se transformer en piège mortel pour les personnes souffrant d’un problème de santé.

Les personnes atteintes de diabète de type 1, et tout particulièrement les enfants, vivent dans de mauvaises conditions. Ils doivent très souvent se réfugier dans les caves, des endroits froids, humides, sombres et insalubres. Il est alors extrêmement difficile de mesurer régulièrement sa glycémie et de s’injecter de l’insuline, tout comme de s’alimenter correctement.

L’association cherche des logements en Suisse pour des familles ukrainiennes avec des enfants diabétiques de type 1. L’idéal serait de trouver des familles d’accueil ou des personnes ayant une expérience personnelle du diabète, mais ce n’est évidemment pas une condition préalable.

Pour plus d’informations et pour prendre contact : www.ifdu.ch (voir aussi l’adresse et les indications sur le matériel recherché, p. 29).

 

Réfugiés et de nouveau réunis

Ilona Barinova, sept ans, a été diagnostiquée diabétique de type 1 il y a trois ans. Dès avril 2022, sa mère a fui avec elle et ses deux frères et soeurs la ville ukrainienne de Tokmak, dans la région de Zaporijjia, pour se réfugier en Pologne. Là-bas, ils ont trouvé refuge dans une famille d’accueil par le biais de la fondation « Fundacja dla Dzieci z Cukrzyca » (« Fondation pour les enfants diabétiques »). Le père a ensuite reçu l’autorisation légale de les rejoindre. La famille vit aujourd’hui à Varsovie. C’est à ce genre d’histoires heureuses que l’association « De l’insuline pour l’Ukraine » aimerait participer dans un avenir proche.

 

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Entretien avec la Dre méd. Olena Shpak, diabétologue et endocrinologue à Odessa

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Andrea Dinevski (AD) : Docteur Shpak, votre cabinet médical coordonne la distribution de médicaments et de matériel d’aide pour 352 familles avec des enfants diabétiques de type 1. Vous vous occupez de beaucoup de ces enfants depuis longtemps. Comment la situation a-t-elle évolué pour ces familles depuis le 24 février 2022 ?

Dre Olena Shpak (OS) : Bien sûr, la situation est devenue beaucoup plus difficile pour les enfants et leurs familles. Tout manque pour le traitement du diabète. Le pire, c’est le stress permanent dû aux allers-retours incessants entre la maison, l’école et l’abri antiaérien. Dans cette situation, un contrôle stable de la glycémie est presque impossible. Le stress permanent entraîne en outre une augmentation significative du nombre de nouveaux cas chez les enfants.

AD : Notre association a reçu l’information selon laquelle il y aurait désormais suffisamment d’insuline. Est-ce vrai ?

OS : Oui, on a de nouveau de l’insuline. Elle n’est certes pas toujours disponible partout, mais les patient ·es sont informé·es de la pharmacie dans laquelle de l’insuline est actuellement disponible et s’y rendent. L’un des problèmes est que certaines préparations d’insuline ne sont pas toujours disponibles, les personnes concernées doivent donc s’adapter.

AD : Les personnes concernées doivent-elles payer elles-mêmes l’insuline ?

OS : L’insuline est gratuite pour les enfants diabétiques. Les adultes atteints de diabète de type 1 dont l’HbA1c est égale ou inférieure à 7,5 mmol/l ne paient pas non plus. Les adultes dont l’HbA1c est supérieure à 7,5 mmol/l paient 15 % des coûts, soit environ cinq francs suisses pour cinq stylos.

AD : Pour contrôler un diabète de type 1, il faut différents moyens auxiliaires médicaux. Lesquels sont particulièrement nécessaires ?

OS : Les bandelettes réactives ! Comment contrôler sa glycémie sans bandelette réactive ou capteur de glucose ? Il faut y aller à l’aveuglette.

Nous manquons également de compresses alcoolisées, qui sont très importantes pour la désinfection. Il ne faut pas oublier que les infections au niveau des points d’injection entraînent souvent des complications chez les diabétiques.

Pour le contrôle continu de la glycémie, nous utilisons le capteur Freestyle Libre 1. Malheureusement, ce capteur n’est presque pas disponible ou seulement à un prix inabordable pour nous. Pour les parents, ce serait une véritable bénédiction si leur enfant pouvait porter un capteur pour la mesure en continu. Ils verraient ainsi sur leur téléphone portable comment se porte leur enfant lorsqu’il est à l’école ou au jardin d’enfants. Mais les classes doivent souvent se faire dans les abris, où les enfants sont inaccessibles pour les parents.

AD : La situation de pénurie rend les choses difficiles pour vos patient·es. Y a-t-il d’autres problèmes qui vous préoccupent particulièrement ?

OS : La situation des femmes enceintes atteintes de diabète de type 1 ou de diabète gestationnel. Je suis responsable des enfants et des adolescents jusqu’à 17 ans. Depuis le début de la guerre, les grossesses d’adolescentes sont plus nombreuses. Un diabète mal contrôlé pendant la grossesse a des conséquences catastrophiques pour l’enfant à naître. Je suis très inquiète pour ces mères et leurs enfants.

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Association « De l’insuline pour l’Ukraine »

Le comité directeur de l’association « De l’insuline pour l’Ukraine » et les diabétiques de type 1 à Zaporijjia, Odessa et Kharkiv vous remercient pour votre soutien !

Contact

Verein « Insulin für die Ukraine », www.ifdu.ch

Andrea Dinevski, Steinwiesstrasse 32, 8032 Zurich

E-mail : andrea.dinevski@ifdu.ch / téléphone : 079 623 93 45

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Compte réservé aux dons : IBAN CH43 0873 3045 6220 9411 4

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Dons en nature

• Bandelettes réactives et appareils de mesure de tous les fabricants
• Capteurs de glycémie (Freestyle Libre, Dexcom)
• Medtronic Guardian 3
• Stylos préremplis
• Aiguilles pour stylos préremplis
• Seringues
• Lancettes et autopiqueurs
• Compresses alcoolisées pour la désinfection
• Sucre de raisin

 

Auteur: Andrea Dinevski, présidente de l’association « De l’insuline pour l’Ukraine », diabétique de type 1 depuis 34 ans