Bien s’organiser pour se baigner l’esprit tranquille
Le diabète rend inventif. Un bandage « sympa » sur le haut du bras et sur le haut du maillot, une petite poche spécialement cousue pour la pompe à insuline. Deux mères décrivent ce à quoi elles veillent pour que leurs filles diabétiques puissent aller à la piscine.
Texte : Pascale Gmür Photos : Jelena Péteut, Sabrina Würgler
« Maman, je peux aller dans l’eau ? », s’exclame Emilia, six ans, pendant que sa mère est au téléphone. « Oui, tu peux », répond Sabrina Würgler en souriant. Elle était justement en train de dire que sa fille nage comme un poisson dans l’eau. « Malgré son diabète, nous voulons qu’Emilia puisse faire tout ce qu’elle aime. » Le bassin dans le jardin et la piscine en plein air font partie de ses endroits préférés. « Barboter, se baigner, nager, plonger nécessitent quelques préparatifs, mais c’est facile une fois qu’on a trouvé les astuces pour sécuriser le capteur de glucose et recouvrir le cathéter d’un ruban adhésif. » Ensuite, reste à savoir comment bien fixer la pompe à insuline pour ne pas qu’elle se débranche pendant la baignade, comme c’est déjà arrivé à Emilia. Pour ce faire, la grand-mère a cousu une pochette refermable dans le dos du tankini d’Emilia. A l’abri dans son étui, la pompe résiste même aux roulades dans l’eau. Le tankini, qui se compose d’un slip de bain et d’un haut qui descend jusqu’à la taille, est idéal pour les filles. La mère enfile le cathéter au-dessus des fesses, juste sous la bordure du slip, et colle un morceau de ruban adhésif supplémentaire sur l’aiguille. Un bandage adhésif coloré enroulé sur le haut du bras de la fillette recouvre le capteur. Si quelqu’un lui demande ce que c’est, Emilia répond sans hésiter qu’elle a du diabète.
Laisser sécher le capteur
Pour Michelle, âgée de 10 ans et atteinte de diabète de type 1 depuis quatre ans, c’est la même chose ; elle n’a aucun problème à parler de la petite pompe à patch ovale, fixée sur sa cuisse, même si elle a du mal à supporter l’adhésif des bandages et des pansements supplémentaires lorsque sa peau en dessous déclenche une réaction allergique, démange et brûle. Pour résoudre ce problème, ses parents ont tout essayé, mais en vain. C’est pourquoi Michelle ne peut rester qu’une demi-heure maximum dans l’eau, tant que le capteur et la pompe adhèrent sans adhésif supplémentaire, explique sa mère Jelena Péteut. « La glycémie de Michelle baisse lorsqu’elle joue et nage dans la piscine, c’est pourquoi nous interrompons l’apport d’insuline basale de la pompe avant qu’elle saute dans l’eau. Quand elle sort, il faut 5 à 10 minutes pour obtenir les résultats. En général, elle mange tout de suite quelque chose. A la place de l’éternel sucre de raisin, elle a des fruits secs ou des glaces à l’eau. » Idéalement, il faut laisser sécher complètement le capteur avant que Michelle ne retourne nager.
La spontanéité avant tout
Les taux de glycémie s’affichent sur le smartphone des parents et de la grand-mère de Michelle et alertent l’école dès que les valeurs atteignent la limite la plus basse ou la plus haute, ce qui peut se produire notamment pendant le sport. La fillette a aussi suivi des cours de natation jusqu’en troisième année, et des membres de sa famille étaient présents pour contrôler sa glycémie et, le cas échéant, réagir correctement. En grandissant, Michelle devient plus responsable. Bien sûr, il lui arrive de réagir avec frustration quand ses frères et soeurs peuvent rester plus longtemps dans l’eau. « Malgré tout », ajoute Jelena Péteut, « nous essayons d’être aussi spontanés que possible et d’intégrer le diabète dans la vie de la famille. » L’automne dernier, ils ont passé des vacances sur un voilier en Croatie, et même le chien portait un gilet de sauvetage. Toute la famille se baignait dans les criques, et comme l’eau était assez fraîche en octobre, personne ne restait longtemps dans l’eau, à l’avantage de Michelle.
« Maman, je sens que je suis trop basse »
Le diabète de type 1 d’Emilia a été diagnostiqué alors qu’elle n’avait même pas 4 ans. Au début, ils utilisaient le stylo à insuline jusqu’à ce que le traitement commence et que les parents optent pour une pompe à insuline avec capteur. Il était clair qu’il fallait un système étanche. Les pansements et bandages adhésifs supplémentaires permettent à Emilia de se baigner sans problème trois quarts d’heure durant le cours de natation hebdomadaire. La mère est sur le bord du bassin, attentive mais détendue. Dans l’eau, certains enfants ressentent moins bien les signes avant-coureurs d’une crise d’hypoglycémie. Cela peut aussi arriver à Emilia lorsqu’elle est distraite par d’autres enfants. « Mais la plupart du temps, elle arrive sur le bord du bassin et dit : ‹ Maman, je sens que je suis trop basse. › Alors, on mesure sa glycémie ou je lui donne du sucre de raisin. » Bien sûr, il faut absolument éviter l’hypoglycémie. Dans l’eau, il peut arriver que la transmission des données du capteur de glucose à la pompe soit interrompue. La pompe sonne et Emilia sort du bassin. « La mère, le père ou toute autre personne de référence doit pouvoir être détendu quand son enfant va nager », déclare Sabrina Würgler. « Personnellement, je préfère qu’Emilia plonge en ayant un peu plus de sucre dans le sang (7 à 10 mmol/l). »