PRÉSENTATION D’IRENE

Je m’appelle Irene (41 ans). En été 2022, on m’a diagnostiqué un diabète de type 1. Deux mois auparavant, je terminais mes études post- diplômes. Deux mois après, je parcourais la petite île grecque de Paros avec mon sac à dos. Je travaille à plein temps et par équipe en tant qu’infirmière anesthésiste et j’aime passer mon temps libre en pleine nature. Un mode de vie loin d’être idéal pour une personne atteinte de diabète. J’ai des journées de travail intenses, avec des horaires irréguliers et de courtes pauses, je voyage fréquemment et je suis souvent seule. Et pourtant, depuis le diagnostic, je suis plus heureuse que jamais. L’écriture est une de mes passions. Mon blog de voyage amateur « Liebesbriefe an die Welt » (Lettres d’amour au monde) m’a donné l’idée d’aborder le thème du diabète sous un autre angle. Des mes- sages poétiques, émotionnels, mais aussi conciliants, comme dans une lettre d’amour très personnelle.

liebesbriefeandiewelt.com

Tu es entré de façon inattendue dans ma vie. Tu m’as donné soif et m’as volé mes nuits. Tu m’as fait perdre du poids, tu as tout bouleversé en moi, tu as ralenti ma pensée, détérioré ma condition physique et assombri mes idées. Je ne comprenais pas vraiment ce qui se passait dans mon corps et j’ai cherché des causes encore et encore. J’ai accusé ma thyroïde et blâmé le stress. Mais en réalité, je n’ai fait qu’ignorer tes signaux de détresse. Maintenant, je sais que c’est toi. Le diabète. Pas de traitement à court terme, pas de pilule miracle, pas de pansement cicatrisant. En somme, un état persistant. Nous avons donc appris à nous connaître, sommes devenus amis et avons décidé de rester ensemble, pour la vie. Depuis deux ans maintenant, tu ne me quittes plus d’une semelle. La phase de découverte a été épuisante et quelque peu inhabituelle. Je me sentais sous pression, car tu prenais beaucoup de place. J’étais limitée dans mes actions et devais constamment tenir compte de toi. D’autant plus qu’avant, j’étais heureuse sans toi. J’aimais le chocolat, je m’enthousiasmais pour plein de choses, j’allais danser et faire la fête, je faisais de la randonnée et je voyageais. Je travaillais beaucoup, je me formais, j’essayais de nouvelles choses, je profitais de la vie et je découvrais le monde. Toi, mon cher, tu as tiré le frein à main et mis ma vie sens dessus dessous. Un séjour à l’hôpital, des visites chez le médecin, des consultations. Des stylos à insuline et un glucomètre. Un flot d’informations, de tableaux, de rendez-vous. Je t’ai bien sûr accepté immédiatement et je ne t’ai pas ignoré, mais l’idée de tout concilier et de m’entendre avec toi ne me semblait pas chose aisée. Ça n’a clairement pas été une promenade de santé. Mais ça n’a pas non plus été un marathon sans ligne d’arrivée. Petit à petit, nous nous sommes rapprochés. J’ai fait quelques compromis, mais j’attendais aussi un peu d’indulgence de ta part pour que tu puisses t’adapter à mon rythme de vie. Un nouveau départ pour nous deux. Deux pas en avant, un pas en arrière. De bonnes valeurs, de mauvaises valeurs, des jours réussis, des jours déprimants. Le premier dîner chez des amis, le premier apéritif bien arrosé, la première part de gâteau, la première pizza. Les premières vacances, la première randonnée, le premier rhume et la première garde de nuit. Toutes ces choses qui allaient de soi auparavant sont soudainement devenues nouvelles pour moi, car tu étais là. Les glucides, désormais indispensables. L’insuline, le carburant de mes cellules. Les encas et le sucre de raisin, mes fidèles compagnons. Le capteur, l’accessoire dont jamais je ne me sépare. Plus que jamais, j’écoute mon corps, la façon dont il réagit au stress et aux émotions, à la relaxation, au mouvement, à l’adrénaline et à l’aventure. Ce qui se passe après la prise d’une forte dose de glucides, d’un verre de vin et de beaucoup de caféine. Nous nous comprenons bien maintenant et nous apprenons tous les deux en permanence. Bien sûr, cela demande une certaine discipline, une bonne gestion, un engagement sans faille, de la patience, une dose de confiance en soi, une pincée de courage, une certaine envie d’expérimenter, un peu de créativité, de l’attention et de l’intuition. Mais jamais avec l’exigence d’atteindre la perfection. Je continue à faire tout ce qui me rend heureuse. Manger avec plaisir et m’amuser. Voyager, faire de la randonnée et découvrir le monde – avec toi !

Auteur: Irene Klötzli